Souffrance au travail : comment repérer que mes collaborateurs vont mal ?
Salariés à bout de nerfs, ambiance concurrentielle au bureau, mal-être psychologique : la souffrance au travail n’est pas un thème nouveau mais elle est de plus en plus présente. Une souffrance que les managers peuvent détecter et combattre au bénéfice de tous. Explications.
Les exemples probant de souffrance au travail ces dernières années ont été nombreux : les suicides au Technocentre Renault en 2006 et 2007, chez France Telecom de 2008 à 2011, chez La poste de 2010 à 2012, ainsi que la montée du stress au travail en général dont nous parlions dans un dossier sur la QVT. Les raisons internes sont multiples : isolation, surcharge de travail, manque de coopération, concurrence au sein de l’entreprise, ou évaluation individualisée qui tourne mal. L’accumulation de ces éléments, plus ou moins importants, peut pousser le salarié ou le cadre à être souvent en arrêt maladie, quelques fois pour une dépression (1 salarié sur 10 aurait déjà pris un congé pour dépression en France), et dans les cas les plus critiques, il peut avoir recours au suicide.
Si ce dernier cas reste un extrême, la souffrance au travail est bien présente et se révèle souvent trop tard, au moment où ce mécanisme met en danger la santé et l’emploi du salarié, mais aussi la productivité et la qualité du travail dans l’entreprise, comme l’explique le psychiatre Christophe Dejours. Il est donc important pour le manager de détecter ces problèmes pour éviter qu’ils s’aggravent.
Des souffrances, des signes avant-coureurs
Il y a plusieurs souffrances liées entre elles dans le monde du travail, mais on peut les regrouper dans deux catégories qui sont la souffrance physique et la souffrance morale. La souffrance morale est liée principalement à l’environnement dans lequel évolue le collaborateur : peu d’échanges, manque de reconnaissance, interactions limitées aux commentaires, concurrence interne, évaluation négative du travail effectué. Cela peut entraîner un phénomène de mal-être au travail ou celui de la dévalorisation du travail et par la suite la dépression.
La souffrance physique s’y ajoute du fait de l’accumulation de stress, d’une charge de travail trop importante ou ingérable, ou même d’une mauvaise gestion des ressources humaines dans l’entreprise. Lorsque cette souffrance physique est trop forte, c’est le moment où l’on parle de « burn-out », ou « épuisement professionnel » qui peut avoir des conséquences graves sur la santé mentale et amener à une longue période d’arrêt maladie, ou à une démission.
Comment détecter ces phénomènes ? L’observation est la clé. Au niveau physique, on peut constater une prise ou une perte de poids rapide, l’apparition de maux liés au stress (mal de dos, mal de tête, digestion), une forte consommation de produits excitants comme le café ou la cigarette, les yeux cernés pendant plusieurs jours, ou tout simplement une forme générale moins bonne. Mais cela passe aussi par l’attitude du collaborateur, qui pourra s’isoler plus souvent, s’écarter des lieux de détente et de discussion, être plus irritable ou travailler au delà des heures de bureaux. Sans pour autant être à l’affût de tout changement de comportement, il est important que le manager constate ces symptômes, surtout lorsqu’ils s’accumulent.
Remédier au mal-être
Cela peut sembler évident, mais pour remédier à la souffrance au travail, il faut permettre au collaborateur de l’exprimer. Les questions « comment ça va ? » ou « tu n’as pas l’air en forme, tu veux en parler ? » sont un premier pas, mais si le manager n’est pas proche du collaborateur concerné, il peut aussi se renseigner auprès des collègues pour identifier le problème. L’important dans tous les cas est d’écouter la personne et de ne pas imposer de diagnostic ou de jugement. Après un échange informel, il sera à propos de clarifier la situation lors d’un entretien pour évaluer ce qui peut être résolu, s’il y a un manque de compréhension dans les objectifs demandés, si cela vient d’une mauvaise organisation du travail, ou même d’une situation personnelle. Il faudra bien entendu prévenir le DRH, puisqu’il est en charge de résoudre tout dysfonctionnement sur le lieu de travail. Et dans les cas les plus sérieux, il ne faut pas hésiter à conseiller un rendez-vous avec la médecine du travail.
Enfin, pour éviter ces phénomènes de souffrance au travail, il n’est rien de mieux qu’une ambiance conviviale, un lien social fort, et une communication régulière entre le manager et les collaborateurs. Proposer des sorties entre collègues, célébrer (avec mesure) les anniversaires, partager le repas du midi ensemble, ou tout simplement offrir un café : ce sont ces petites choses qui rendent la vie au travail plus agréable. De cette façon, les excès de stress, les « mauvaises passes », et autres fatigues chroniques peuvent être discutées à temps pour éviter à chacun de garder ses problèmes pour soi, et voir la semaine de travail plus sereinement. Car des collaborateurs heureux, ce sont toujours des collaborateurs plus productifs.