Courage et management
Je ne parle pas ici du courage du pompier, ou du soldat qui fait la guerre en Afghanistan, du courage qui consiste à se jeter à l’eau pour sauver un enfant. Pour nous autres gens de la ville, ce courage-là est un courage qu’on regarde à la télé, qu’on lit dans les journaux, qui ne fait pas partie de notre quotidien, qu’on ne voudrait d’ailleurs sans doute pas imiter, tant il peut paraître inaccessible, lointain, un peu exotique, étranger. Pour approfondir votre réflexion sur ces registres, je vous conseille un numéro passionnant de la revue INFLEXIONS (n° 22) qui a justement pour thème unique « le courage ». Plusieurs blogs ont déjà brillamment commenté ce numéro exceptionnel, qui parle de beaucoup de formes de courage, et élargit aussi la réflexion sur d’autres thèmes comme : faut-il ou non du courage pour adopter un enfant handicapé ?
Je veux parler ici du courage des managers et du top management, en le focalisant sur le courage de « dire », puisque une bonne part du rôle du manager est dans le « dire » et non dans le « faire ». Bien-sûr, ce courage-là rejoint, au moins sur un point, celui du soldat : on a besoin de tripes pour se confronter à une situation de mise en danger.
Faut-il du courage dans l’entreprise, Sans nul doute. Pour dire à un collaborateur que, « non ça ne va pas ». Pour challenger une demande hiérarchique qui n’apportera rien. Pour accepter de s’entendre dire certaines choses désagréables par un collaborateur ou un pair. Autant de situations à la fois courantes et pas faciles à traiter, qu’on n’entoure pas spontanément de trois cœurs dans sa to-do list.
Est-ce-que le courage est moteur de mieux-être chez le manager, chez les collaborateurs ? Pour le manager, la réponse est similaire pour tout ce que nous demande un effort, un dépassement, comme de cesser de fumer : c’est très difficile sur le moment, et en même temps moteur quand la situation est débloquée ou moins pourrie. Pour les collaborateurs, à condition que le manager y mette les formes, ce peut être une étape importante pour avancer, se repositionner, repartir.
Pourtant, trop souvent, le manager va chercher mille solutions d’évitement : il va retarder le plus tard possible l’annonce d’une mauvaise nouvelle, virer le formateur ou le consultant ( ce sont des fusibles faciles), promouvoir la non-compétence, recourir à un harcèlement psychologique savamment dosé ou mettre dans un placard sans le lui dire le collaborateur qu’il a en ligne de mire, bref, il ne sera pas courageux.
Pour respecter leur manager, les collaborateurs ont besoin de percevoir son courage plutôt que de constater sa faiblesse, voire sa lâcheté. Contrairement à d’autres mots qui ont été vidés de leur contenu, galvaudés à force d’être affichés dans des projets d’entreprise ou des chartes de valeurs, le courage garde une force, un sens aux yeux de tous.
Comment faire pour remonter l’indicateur, le KPI de la valeur courage? Peut-on former au courage ? Sans doute non. Mais tous les outils existent pour avoir une photographie, mettre en main des méthodes, des entraînements à la « conversation courageuse ». Après, il faut le vouloir. Je vous y encourage !